Archives par mot-clé : Gérard Bonnet

Gérard Bonnet : symptôme et conversion

 

Le terme conversion, proposé très tôt par Freud, désigne le passage d’une expression psychique à sa manifestation somatique. L’auteur rappelle pourquoi il en propose une conception élargie, faisant de la capacité de conversion une potentialité intrinsèque au symptôme comme structure. Il pose ensuite la question du statut de cette notion à l’adolescence. Non seulement on y assiste souvent à des conversions au sens restreint, mais le long cheminement qui s’impose alors reprend souvent tel ou tel trait de la conversion entendue au sens large. Ce parcours est commenté à partir d’un cas de soliloquie transitoire, déjà proposé dans un article sur la honte, qui s’apparente à une conversion de type philosophique ou religieuse. C’est l’occasion de signaler le rôle joué successivement par les idéaux, l’affect, le fantasme, « l’autre étranger », et surtout de préciser en quoi consiste la capacité de conversion. Il s’agit du ressort qui assure l’encaissement des séductions précoces ainsi que la réaction qui s’ensuit, ce qui donne au sujet la capacité à régresser et à rebondir, à s’enfermer et à s’ouvrir, indispensable à son ancrage dans l’univers où il est appelé à vivre.

Gérard Bonnet : l’œil ou le regard ? à propos de quelques écrits récents centrés sur la question du regard

L’auteur analyse plusieurs articles et ouvrages qui ont été consacrés au rôle capital joué par le regard dans les relations humaines depuis quelque temps. Il en dégage les principaux enseignements et regrette le manque de concertation et d’échange qui les caractérise alors qu’il s’agit d’un sujet particulièrement brûlant. Cela tient sans doute au fait que l’on ne tient pas suffisamment compte des apports de J. Lacan concernant la distinction entre l’œil et le regard.

Gérard Bonnet : pour l’amour du sexe

On ne peut pas aimer les autres si l’on ne commence pas par s’aimer soi-même, ce que la psychanalyse traduit d’une autre manière en rappelant que le narcissisme est un préalable indispensable à toute relation. On peut dire la même chose à propos du sexe proprement dit. Le sujet humain ne peut pas aimer le sexe de l’autre, et donc affronter la différence qu’il représente à tous les niveaux de l’existence, s’il ne commence pas par aimer et investir son propre sexe à la fois comme objet génital, pulsionnel et idéal. Cela suppose qu’il soit provoqué et reconnu par l’adulte, et qu’il garde aussi la possibilité de se dégager régulièrement de cette emprise de façon à s’affirmer à partir de son propre désir.

Gérard Bonnet : les idéaux à l’adolescence

On met souvent la crise adolescente telle qu’elle se manifeste aujourd’hui dans les banlieues sur le compte d’une « maladie d’idéalité ». L’auteur montre qu’il s’agit moins d’un manque, que d’un trop d’idéaux matériels qui empêchent l’adolescent d’adhérer à des valeurs universelles facilitant son insertion. Pour montrer comment une évolution est possible, il analyse le film des frères Dardenne, La promesse, où l’on peut suivre pas à pas cette évolution et en analyser les différentes composantes. Il situe cette évolution dans le processus de conversion au sens large et souligne le rôle majeur joué par la référence à l’imago maternelle.

Gérard Bonnet: Le bel adolescent

Le mythe de Narcisse est un mythe d’origine qui retrace l’origine des désirs visuels et de leurs avatars relatant comment chaque adolescent accède à la découverte de la beauté qui l’habite et à sa prise en compte. La légende de Marina rapportée et commentée par C. Louis-Combet dans son roman Marinus et Marina en est une autre illustration d’un point de vue féminin, en soulignant mieux encore le rôle nécessaire joué par les autres dans ce cheminement et ses deux moments essentiels: celui de l’intériorisation, au moment de la mort de la mère, en référence au père, et celui de l’appropriation proprement dite au moment de la mort du père, en relation avec une autre femme. Il en ressort que l’assomption de la beauté passe par celle du sexe propre et qu’elle suppose un cheminement à rebours vers une expérience esthétique première où la mère tient une place centrale.
Ce cheminement passe toujours par un croisement où surgit une épreuve plus délicate encore, celle de la rencontre avec l’autre sexe: pour supporter cette rencontre et en faire une épreuve féconde, il faut en passer d’une façon ou d’une autre par l’expérience du sublime. C’est pourquoi l’adolescent est tellement à la recherche d’expériences de ce type. C’est pourquoi aussi les dysmorphophobies sont chez lui si fréquentes, de même que certains traits hermaphrodites ou les divers comportements de travestissement. Ils témoignent des difficultés inhérentes à ce parcours ainsi que des détours qu’il entraîne. Surtout lorsque se produisent certains événements particulièrement perturbants: séparations brutales, deuils précoces, révélations intempestives sur les origines, etc. C’est pourtant en s’appuyant sur ces conditions spécifiques à chacun qu’on lui permet le mieux de se situer.

Gérard Bonnet : Marilyn Monroe, dernières séances. L’exhibitionnisme féminin à son zénith

M. Schneider rapporte dans son livre Marilyn dernières séances la façon dont s’est déroulée durant trente mois la dernière tranche d’analyse de Marilyn Monroe avec Ralph Greenson et démontre l’aspect passionnel de cette relation. Une mise en évidence de la problématique exhibitionniste de l’actrice aurait certainement permis d’approfondir davantage les enjeux de cette analyse. L’auteur explicite les données de la clinique de l’exhibitionnisme, chez la femme en particulier, pour montrer qu’elles sont ici très présentes, et qu’elles éclairent pour une bonne part la façon dont les choses ont évolué.

Adolescence, 2008, T. 26, n°2, pp. 479-491.

Gérard Bonnet : mystique et conversion à l’adolescence

L’auteur aborde l’expérience mystique à partir de récits classiques tels que le mythe de la caverne et la conversion de Moïse pour éclairer des témoignages qui nous viennent de l’écoute analytique la plus courante. Il montre que l’expérience mystique est un moment intense, où le sujet éprouve en un éclair la sensation d’accéder à la jouissance idéale qu’il a imaginée follement dans l’enfance et s’y plonge avec délices sans savoir exactement de quoi il s’agit. C’est aussi le moment où lui reviennent douloureusement les failles et les ombres de ces expériences premières, et où il risque de s’y soumettre corps et âme tellement elles sont indissociables de la jouissance en question, s’adonnant à des symptômes, des addictions ou des passages à l’acte qui sont directement sous leur gouverne. C’est enfin et surtout l’instant où il est obligé d’assumer les conflits qui en résultent s’il veut faire la part des choses entre ces vécus exceptionnels dont il porte l’espérance au plus profond de lui-même et la réalité dans laquelle il est appelé à s’investir aujourd’hui.

Adolescence, 2008, T. 26, n°1, pp. 41-63.

Gérard Bonnet : cuando el ideal empuja al paso al acto

Es clásico de atribuir los actos humanos violentos y excesivos que se producen regularmente sobre la escena  privada o publica al desencadenamiento de las pulsiones agresivas : invocamos entonces, la fragilidad de las instancias del super-ego que no han jugado su función. Freud se refiere regularmente a ese esquema a partir del segundo tópico, y el inspira la mayor parte de modelos educativos en vigor. Sin embargo, ocurre que los ideales  que deben controlar las pulsiones dan lugar ellos mismos a la emergencia de pasajes al acto de naturaleza violenta. En esos casos, hay una idealización sin sublimación, y el ideal que se halla en el centro de la idealización se halla deseado por el mismo. En lugar de ser el vector del deseo que conduce a la sublimación, el concentra la energía pulsional y la libera de una manera explosiva. Es por ello que un análisis profundo de los ideales se impone para poner en evidencia los elementos de esta explosión y la manera de desactivarla.

Adolescence, 2013, T. 31, n°4, pp. 897-915.

Gérard Bonnet : when ideal leads to passage to the act

It is standard practice to attribute the human acts of excessive violence that occur regularly in private and in public to an unleashing of aggressive drives : one speaks of the weakness of instances of the superego which have not fulfilled their role. Freud regularly refers to this schema, starting with his establishment of the second topic, and he is the inspiration behind most of the educational models now in force. However, the very ideals that are supposed to control drives can sometimes lead to violent passages to the act. In such cases, there is idealization without sublimation, and the ideal which is at the heart of the idealization is invested for its own sake. Instead of being the vector for desires, opening the way for sublimation, it bottles up drive energy and liberates it in an explosive way. This is why a deeper analysis of ideals is needed if one is to discover the components of the explosion and the way of dealing with it.

Adolescence, 2013, T. 31, n°4, pp. 897-915.

Gérard Bonnet : quand l’idéal pousse au passage à l’acte

Il est classique d’attribuer les actes humains violents excessifs qui se produisent régulièrement sur la scène privée ou publique au déchaînement de pulsions agressives : on invoque alors la faiblesse des instances surmoïques qui n’ont pas joué leur rôle. Freud se réfère régulièrement à ce schéma à partir de la mise en place de la seconde topique, et il inspire la plupart des modèles éducatifs en vigueur. Pourtant, il arrive que les idéaux censés contrôler les pulsions donnent eux-mêmes naissance à un passage à l’acte violent. Dans ces cas-là, il y a idéalisation sans sublimation, et l’idéal qui est au cœur de l’idéalisation est investi pour lui-même. Au lieu d’être le vecteur du désir, ouvrant à la sublimation, il concentre l’énergie pulsionnelle et la libère d’une façon explosive. C’est pourquoi une analyse approfondie des idéaux s’impose pour dégager les composants de cette explosion et la façon de la désamorcer.

Adolescence, 2013, T. 31, n°4, pp. 897-915.