Archives de catégorie : Mettre en scène – 2005 T. 23 n°3

Antoine Masson, Michel Heinis, Tanguy De Foy, Raphaëlle De Menten, Guy Mertens : PASSADO : une proposition d’espaces et passages pour l’adolescence

 

L’espace d’échange  www.passado.be permet aux adolescents de déposer, dans le respect de l’intimité, leurs réflexions mais aussi leurs malaises, leurs vécus d’urgence, leurs passions ou tentations de l’extrême, autant de dimensions qui cherchent un lieu où s’inscrire afin de trouver une issue non désastreuse. Chaque participant s’engage sous une signature qu’il s’est choisie, ayant ainsi l’occasion de mettre en scène le double de soi-même et de l’apprivoiser. La fonction du tiers y est essentielle, de même celle des traces, tant sur l’espace d’échange où chaque participant peut revenir sur son dire initial, que sur le site lui-même où les animateurs transcrivent régulièrement quelques traces des échanges.

Ingrid Piesen : le rituel techno

 

Le mouvement techno représente un courant musical « contre-culture » autour duquel la jeunesse se rassemble en mettant en place des espaces festifs « ré-créatifs ». Cet article se propose de montrer le caractère paradoxal du phénomène de la rave party qui, outre le risque de chronicisation de vécus cas-limites qu’il comporte, semble ouvrir parfois à un processus de subjectivation, à travers la régression que suscitent le lien groupal et les rituels qui l’organisent (tradition musicale, usage de drogues et intégration de codes spécifiques).

Frédéric Lefevere, Thierry Rochet : entre jeu et rêve, la prise en charge d’adolescents en balnéothérapie

 

Une fois posée une instance corps, il est souvent pointé combien celle-ci est mise à mal par le processus pubertaire. À l’inverse, nous souhaitons montrer comment les dispositifs médiatisés et en particulier la balnéothérapie trouvent une légitimité toute particulière à l’adolescence, en ouvrant une voie de restauration de cette instance qui pourra retrouver, au décours du processus psychothérapique, son statut de vecteur de figuration.

Marie-Hélène Garceau-Brodeur, Mylène Fernet, Joseph Josy Lévy, Lyne Massie, Guylaine Morin, Joanne Otis, Johanne Samson, Normand Lapointe, Jocelyne Thériault, Germain Trottier : à propos du VIH/sida à l’adolescence

 

Suite à l’épidémie du VIH/sida, des enfants se sont retrouvés infectés, en particulier par transmission du virus de la mère à l’enfant, mais, grâce aux progrès des traitements antirétroviraux, plusieurs de ces jeunes sont aujourd’hui des pré-adolescents et des adolescents. Une étude exploratoire auprès de neuf adolescents Montréalais vivant avec le VIH/sida permet de dégager les problèmes particuliers qu’ils rencontrent : répercussions entourant l’annonce du diagnostic d’infection, préoccupations touchant le dévoilement à l’entourage, en particulier le groupe des pairs, craintes liées à l’établissement des relations intimes ou aux projets de parentalité ainsi qu’à l’exercice de la sexualité et la prévention. Cette étude exploratoire met en évidence certains des enjeux auxquels ils sont confrontés dans leur développement psychosexuel.

Jocelyne Thériault : la douleur physique du marquage corporel

En pleine expansion chez les jeunes, en particulier chez les jeunes femmes de tous les milieux, le marquage corporel est devenu, au fil des ans, un phénomène qui intrigue et questionne tout à la fois. Au-delà du désir de conformité sociale qui caractérise les jeunes, quelles réalités psychiques conduisent certains d’entre eux à répéter encore et encore les pratiques du tatouage et du perçage corporel alors qu’ils y font, à chaque fois, l’expérience de la douleur physique? Est-ce que seule la marque laissée sur le corps fait de cette douleur physique l’expérience à vivre et à dire? Développée grâce aux données de la documentation portant sur le développement psychosexuel, le marquage corporel et le masochisme, la position adoptée dans cet essai veut que la douleur physique du marquage soit à situer dans le contexte du développement psychosexuel normatif de l’adolescence plutôt que celui de la perversion. Plus spécifiquement, la thèse développée veut que la douleur physique du marquage vienne s’associer aux souffrances psychiques de l’adolescence et ce, afin de leur donner sens et de les maîtriser.

Marion Haza, Pascal-Henri Keller : scarifications chez l’adolescent suicidaire : une tentative pour penser ?

 

Les scarifications de l’adolescent posent des questions concernant ses limites physiques et psychiques, limites entre son espace interne et son espace externe. Mais elles interrogent aussi le narcissisme et la représentation du corps. À l’aide d’entretiens réalisés auprès d’adolescents suicidants, le présent travail approche la mise en scène dans le réel de la conflictualisation psychique. Grâce aux scarifications, les adolescents parviennent à symboliser des frontières dans l’espace, dans le temps et dans leur relation aux autres. Seul l’après-coup permet un travail psychique et la remise en route de « l’appareil à penser ».

Donald L. Campbell : l’état pré-suicidaire chez une adolescente

 

Cet article cherche à approfondir notre compréhension psychanalytique d’une tentative de suicide chez une adolescente. L’acte suicidaire est à appréhender comme la mise en acte d’un fantasme suicidaire. Après avoir étudié la nature et la fonction des différents types de fantasme suicidaire, l’auteur se focalise sur celui de sa patiente. Pendant la phase pré-suicidaire, le père de la patiente – en particulier son incapacité à revendiquer sa fille ou à se présenter soit comme rival amical de la mère soit comme objet de rechange – joue un rôle crucial dans l’état psychique de l’adolescente, comme en témoignent le transfert de la patiente et le contre-transfert de l’analyste. Un aspect fondamental de la dynamique qui s’enclenche pendant la thérapie d’un patient pré-suicidaire est la tentative de celui-ci pour forcer son analyste à participer, en collusion avec lui, dans le scénario suicidaire de façon à ce que l’analyste « autorise » ou « cause » le passage à l’acte suicidaire. Ces hypothèses sont illustrées par des extraits du matériel clinique d’une adolescente qui fit une tentative de suicide au cours de son analyse.

Denise Medico, Joseph Josy Lévy : le premier baiser

 

Geste significatif dans les représentations sociales et artistiques, le baiser constitue l’une des icônes de la modernité. À partir d’entrevues exploratoires et d’un questionnaire passé auprès d’étudiants universitaires du Québec et de Suisse Romande, la place et la signification du premier baiser dans l’adolescence ont été cernées. Les données suggèrent un ensemble de contextes (baiser-jeu ou initiation) axés sur l’expérimentation et l’exploration de techniques. Cependant les facteurs nationaux semblent intervenir quant à la modulation de la place du baiser dans les scénarios sexuels, contribuant au développement psychosexuel.

Jean-Bernard Chapelier : « la grande illusion » : fête et processus groupaux

 

La fête condense deux attentes contradictoires, l’une individuelle à savoir trouver le partenaire amoureux et/ou sexuel idéal, et l’autre de retrouver la sécurité narcissique au sein d’un groupe qui promet des plaisirs sans comparaison. Le choix est d’autant plus difficile que les deux solutions ont fantasmatiquement la même conséquence : la félicité du « sentiment océanique ». Pris entre la fidélité au groupe et l’espoir d’une rencontre amoureuse, l’adolescent opte souvent pour une troisième voie, celle de la recherche rapide d’un état second par la consommation d’alcool ou de stupéfiants.

Jacques Arènes : fête et religion : un espace de subjectivation

La fête est née dans l’environnement religieux mais la fête religieuse a évolué dans son contenu et dans ses buts. Le « nous » s’y éclipse au profit de la valorisation narcissique et de la recherche de subjectivation. Certains aspects de la fête religieuse sont investis aujourd’hui comme espaces de conversion et de transformation de soi. Dans tous les cas, le sujet adhèrera au « nous » religieux d’une manière intermittente, dans des moments de capillarité fusionnelle, éventuellement renouvelés dans le temps, sans pour autant s’inscrire dans une église. Le festif sera autant le moment de rencontre avec Dieu que la scène imaginarisée de confrontation à son propre destin.