Tous les articles par Admin

Olivier Douville : du rituel et de l’adolescence aujourd’hui

Le rite est un objet au carrefour des champs de l’anthropologie et de la psychanalyse. Nous serons attentif à souligner ce qui le différencie de l’habitude ou de la répétition. Le rite est un passage et une expérience. S’il est rite de passage, alors il permet des changements d’altérité et aussi de relier le sujet à la loi sexuelle et à la mythologie collective.

L’adolescence occidentale, qui tend à se généraliser de par le monde, développe des tendances à des ritualisations nouvelles à mesure que les encadrements symboliques entre rite et mythe tendent à se disjoindre. L’auteur pose la question des fonctions psychiques de la ritualité à l’adolescence.

Adolescence, 2010, T. 28, n°4, pp. 873-886.

Jonathan Ahovi, Marie Rose Moro : rites de passage et adolescence

L’adolescence est souvent considérée comme un passage. Or, dans toutes les cultures, des façons de régler et de réguler les difficultés de passage d’un statut à un autre – dont le passage adolescent – sans trop d’angoisse pour les novices et pour les adultes déjà initiés, existent.

Dans nos sociétés dites modernes, complexes et métissées le risque pour les adolescents de se perdre et de rester en marge semble plus grand.

Nous voudrions clarifier les notions de rites de passage et en rappeler la définition et les fonctions à partir de l’apport d’A. Van Gennep.

Adolescence, 2010, T. 28, n°4, pp. 861-871.

Catherine Potel : quand la médiation aide à se construire un corps « psychique »

Un adolescent et son corps : cet article pourrait s’intituler ainsi. Dans ma pratique de psychomotricienne qui utilise des médiations corporelles (entre autres la danse), il est question de corps, de gestes, de mouvement. Il est question aussi de construction psychique. Après avoir exposé un travail clinque avec un adolescent dans un atelier relaxation puis dans un atelier danse, je proposerai quelques réflexions théorico-cliniques qui mettent en exergue ce qu’un  travail corporel soutient dans le processus de construction du sujet.

Adolescence, 2010, T. 28, n°4, pp. 853-859.

Renaud Evrard : psychiser le maître absolu : solutions pubertaires par le paranormal

L’intérêt d’une majorité d’adolescents pour le paranormal, comme théorie et comme expérience, se lit dans les statistiques de divers sondages, au point de l’élever au rang d’une banalité. Le contact avec le paranormal peut être motivé par la curiosité et l’ennui (Mischo, 1991), mais aussi impliquer des enjeux plus profonds dans un questionnement sur la mort. Ainsi, le recours à une séance de spiritisme peut être une modalité d’exploration des limites du symbolique et des effets du signifiant (Le Maléfan, 2008). Cette mise en scène de la mort peut aussi apparaître, paradoxalement, comme une des formes du fantasme d’immortalité dégagé par Ph. Gutton (1993) au temps pubertaire. Ce fantasme peut se développer pour devenir une solution provisoire pour élaborer un deuil ou un traumatisme. Nous essayerons de montrer, au travers de cas cliniques, comment l’adolescence, pensée comme un temps logique proche des états limites, peut subjectiver la mort, ce maître absolu, en la « psychisant », c’est-à-dire en se rapportant à des pratiques cultivées depuis plus d’un siècle par les sciences psychiques et le spiritisme.

Adolescence, 2010, T. 28, n°4, pp. 841-852.

Anne Joly, Sébastien Dupont : Julie et « Monseigneur » : des carences affectives précoces à la formation d’un compagnon imaginaire à l’adolescence

Le phénomène du compagnon imaginaire a été essentiellement décrit chez l’enfant et la personne âgée, plus rarement chez l’adolescent. Son apparition à l’adolescence peut souvent être confondue avec l’émergence d’idées délirantes et interprétée comme un signe prodromique de schizophrénie. Nous présentons ici le cas de Julie, une adolescente de dix-sept ans, afin d’illustrer l’hypothèse selon laquelle le phénomène du compagnon imaginaire peut apparaître dans un contexte psychopathologique distinct du fonctionnement psychotique. Cette jeune fille a en effet compensé une dépression latente par la compagnie d’un compagnon imaginaire qu’elle nomme Monseigneur. Nous décrivons en détail cette situation clinique, le déroulement des prises en charge thérapeutiques ainsi que l’évolution psychologique de Julie.

Adolescence, 2010, T. 28, n°4, pp. 829-840.

Vincent Cornalba : lagado

L’auteur envisage la question d’un changement dans le langage à l’adolescence comme mise en œuvre de cette dimension mutative dont le pubertaire est tout entier l’expression. La destitution dont le mot peut à tout moment être saisi, témoignerait du manque consubstantiel à tout langage. La recherche portée par l’adolescent consisterait à dévoiler ce manque à signifier, tout en s’assurant de la permanence du registre du langage. Cette « œuvre » s’inscrirait plus généralement dans ce régime de la preuve dont autrui reste, plus que jamais, le garant. C’est par l’autre que l’adresse et sa réception seraient assurées d’une permanence, malgré ce manque à signifier.

Adolescence, 2010, T. 28, n°4, pp. 817-828.

Alix Bernard : les séparations d’amadou

Cet article rend compte d’un travail de psychothérapie individuelle entrepris avec un adolescent sourd, au sein de l’institution spécialisée où il était accueilli, et montre combien l’adolescence peut être une crise violemment désorganisatrice, mais aussi un moment où se mobilisent de nouvelles ressources. Séparé de sa famille du fait de son handicap depuis l’âge de quatre ans dix mois, l’entrée en puberté ramène au premier plan la question de cet éloignement. Amadou évoque alors différentes versions de cette séparation, véritables « scènes pubertaires » (Gutton, 1991) dans lesquelles s’actualise l’événement infantile, la violence de cet événement se liant à celle de l’adolescence. La crise traversée est l’occasion d’élaborer le trauma infantile, et de trouver et d’interroger les appuis proposés par l’environnement – la psychothérapie, l’institution et l’entourage familial. Cette étude de cas permet de réfléchir plus généralement aux enjeux œdipiens de la séparation, la visite de ses parents à l’acmé de sa crise lui ayant permis de s’engager plus avant dans un processus adolescens (Gutton, 1996). Ce travail offre également l’opportunité de s’intéresser aux travaux d’anthropologues et psychanalystes (Erny, 1972, 1988 ; Ortigues, 1966) dont les travaux apportent un éclairage précieux sur la séparation de l’enfant d’avec la mère et la famille, et sur les spécificités de l’organisation œdipienne en milieu africain.

Adolescence, 2010, T. 28, n°4, pp. 795-815.

David Le Breton : adolescence et prise en charge thérapeutique

Les conduites à risque sont des manières pour le jeune de lutter contre sa souffrance. Les modes de résolution des tensions sont multiples, elles impliquent notamment des pratiques culturelles comme le théâtre, la musique, le sport, etc. ou des rencontres. La psychothérapie d’inspiration analytique vaut surtout pour le jeune qui en accepte le principe. Mais elle implique un ajustement du cadre, et une implication du thérapeute. La qualité de la relation est aussi importante que le contenu des paroles échangées.

Adolescence, 2010, T. 28, n°4, pp. 781-793.

Philippe Gutton : perlaborer dans la cure

Lorsque la création adolescente ne parvient pas à reconstruire le Moi-je en tenant compte de la nouveauté pubertaire, le psychanalyste doit inventer une pratique spécifique ; soit un travail de construction auquel l’adolescent est susceptible de s’identifier. Lorsque la création adolescente n’est ni partageable ni partagée, la cure doit proposer un champ commun où peut se développer une perlaboration à deux au sein de laquelle les conditions (en règle infantile) de l’impasse (breakdown) sont imaginées ensemble.

Sont travaillés successivement : – les modalités de l’intervention, en particulier leur souplesse et leur limite ; – la différence de fait que l’adolescent apporte un matériel ou non ; – le processus en jeu dans les constructions du psychanalyste en l’occurrence la sublimation qui est mise en opposition avec l’emprise de l’idéal ; – l’implicite risqué de la déconstruction dans toute suggestion imaginaire de l’analyste.

Adolescence, 2010, T. 28, n°4, pp. 747-780.

Patrice Huerre : abaisser l’âge de la majorité : pour en finir avec l’adolescence

La manière de faire passer de l’état d’enfant à celui d’adulte au décours de la puberté a beaucoup évolué au long de l’histoire. Les changements physiologiques du corps ont été le plus souvent corrélés au changement statutaire et juridique du sujet. Force est de constater qu’il n’en est plus rien et que, depuis sa création au milieu du XIXe siècle, l’adolescence n’a fait que s’étendre au détriment de la phase de latence en amont et de l’accès à la maturité en aval. Les difficultés que cette situation occasionne pour les adolescents doivent nous inviter à la remettre en question et à proposer un abaissement de l’âge de la majorité.

Adolescence, 2010, T. 28, n°3, pp. 699-708.