Archives de catégorie : Violence – 1998 T. 16 n°1

Laurence Corthay-Casot, Olivier Halfon: la violence dans le contexte de l’adolescence

Les auteurs proposent une réflexion relative à la violence agi en augmentation dans la population adolescente et ils s’interrogent sur la compréhension analytique des mouvements destructeurs, aussi bien hétéroagressifs qu’autoagressifs. Différentes positions théoriques sur la question de la pulsion de mort, de la dé-liaison pulsionnelle ou de la tentative de sauvegarde d’un sentiment d’identité lors de l’irruption de violence sont abordées rapidement, suivies de deux vignettes cliniques. La réflexion à partir de ces vignettes tente une mise en lien des aspects intrapsychiques et familiaux qui sous-tendent le recours aux passages à l’acte violents chez ces sujets, en relation avec la problématique adolescente. L’impasse identificatoire momentanée est évoquée ainsi que l’interdépendance entre la violence dirigée contre soi et celle dirigée contre autrui.

Adolescence, 1998, T. 16 n°1, pp. 295-308.

Corinne Gauthier-Hamon: pédophiles et maltraitances transgénérationnelles

C’est en rencontrant François, jeune homme élégant de trente-cinq ans, venu me demander une analyse car il savait que j’avais écrit un livre sur la pédophilie, qu’un éclairage nouveau m’est apparu sur ces pratiques pédophiliques dont nous avions effectivement longuement parlé dans un ouvrage précédent, mon collègue Roger Teboul et moi-même. (Entre père et fils. La prostitution homosexuelle des garçons, Paris, PUF, 1988.)

Si, à l’évidence, dans de nombreux cas de pédophilie, nous retrouvons des deux côtés, c’est-à-dire, aussi bien pour l’adulte que pour l’enfant, des situations carentielles et maltraitantes, il m’a semblé qu’un trait supplémentaire unissait pédophiles et enfants, à savoir, non seulement l’existence mais aussi la transmission transgénérationnelle d’une ou de plusieurs formes de maltraitances, certes physiques mais également psychiques, beaucoup plus pernicieuses.

C’est cet aspect des choses que j’aborderai dans un premier temps à partir de l’histoire de François, comparée aux histoires cliniques antérieures, avant de questionner l’impact de ces maltraitances dans la constitution du psychisme avec ses différents aspects psychopathologiques.

Mais aussi, la maltraitance ne peut manquer d’évoquer la problématique de l’inceste avec sa nécessaire transmission transgénérationnelle en l’absence d’intervention thérapeutique, ce qui ouvre un champ d’investigation complémentaire.

Enfin, pouvoir remettre en perspective un « choix » pédophilique avec une histoire émaillée de maltraitances, souvent non reconnues comme telles, donne un argument supplémentaire pour réfuter l’incurabilité des pédophiles et l’inévitable reproduction de la pédophilie pour les enfants victimes.

Adolescence, 1998, T. 16 n°1, pp. 295-307.

Isabelle Orgiazzi Billon-Galland: viol et meurtre à l’adolescence: valeur heuristique du T.A.T

La compréhension de la clinique et de la thérapeutique des troubles majeurs du comportement de viol et de meurtre chez l’adolescent est envisagée ici à partir de la contribution des techniques projectives. La spécificité des protocoles T.A.T. montre l’efficacité temporaire du clivage à l’œuvre chez ces adolescents, ainsi que l’échec de celui-ci lorsque la représentation de perte d’objet est sollicitée, mobilisant alors une angoisse considérable d’abandon et d’anéantissement qui va contribuer à la désintrication pulsionnelle. La tonalité d’un vide interne mortifère se déploie alors dans un narcissisme toujours menacé d’effondrement.

Adolescence, 1998, T. 16 n°1, pp. 294-307.

Jean-Jacques Rassial: la violence sexuelle des adolescents

L’accroissement du nombre de violences sexuelles commises par des adolescents, en particulier en réunion, exige une réflexion clinique, psychopathologique, métapsychologique et anthropologique, ici introduite. Le malaise actuel du lien social, la modification des valeurs et surtout la sexualité « nouvelle » promue dans nos sociétés induisent, chez des adolescents ordinaires, des conduites perverses, selon une psychopathie qui ne témoigne que d’une difficulté à associer les interdits oedipiens et les exigences du surmoi collectif.

Adolescence, 1998, T. 16 n°1, pp. 294-306.

André Clavaldini: caractéristiques de l’enfance et de l’adolescence du délinquant sexuel

L’étude française sur les agresseurs sexuels qui s’est déroulée de 1993 à 1996 dans dix-huit Services Médico-Psychologiques Régionaux compare deux cohortes. L’une d’agresseurs sexuels, l’autre d’auteurs de coups et blessures volontaires (« Témoins »). Cette recherche montre que les agresseurs sexuels furent des enfants et adolescents mieux intégrés que les « Témoins » dans les circuits scolaires. Cependant, très tôt des cauchemars reflètent chez eux un sentiment d’insécurité profond ce qui entraîne plus de demandes de consultations psychologiques ou psychiatriques pour troubles du sommeil dans l’enfance et à l’adolescence. Parmi les motifs de consultations (qui sont doubles des « Témoins ») on retrouve déjà des comportements sexuels particuliers et des agressions sexuelles caractérisées. Les relations sadiques sévères et une tendance précoce à la cruauté franche envers les animaux, fussent- ils familiers, sont une caractéristique des agresseurs sexuels. L’autre grande caractéristique est, dans plus d’un cas sur trois, une agression sexuelle avant dix ans, qui sera dans les trois quart des cas multiple ou répétée au cours de l’enfance ou de l’adolescence. Cependant l’exploration des débuts de la vie sexuelle de ces sujets indique qu’un nombre plus important d’entre eux ont été victimes d’agressions sexuelles, par des hommes ou des femmes de leur entourage, sans qu’il soit possible pour eux de repérer ces actes comme des agressions. Cela amène l’auteur à faire l’hypothèse selon laquelle il existe pour de tels sujets une « séduction primaire continue » dont l’acte d’agression, présenté souvent comme une « initiation » serait un aboutissement « logique ». Enfin, cette étude indique que l’acte d’agression sexuelle fonctionne dès l’adolescence comme un comportement anti-dépresseur.

Adolescence, 1998, T. 16 n°1, pp. 293-305.

Claude Balier: la violence à la lumière des processus adolescents

Bien plus qu’une période de la vie, l’adolescence est le contenant de toute une série de processus déjà inscrits chez l’enfant dès la naissance. C’est en fonction d’une réponse adéquate des objets que les processus parviendront à leur plein développement. La violence à être prendra alors la forme d’un projet de vie, expression du Surmoi qui marque l’achèvement de l’adolescence. Tel n’est pas le destin de sujets auteurs d’agressions sexuelles. La violence non intégrée les conduits à laisser dissoudre leur Moi dans le jeu des processus. L’agression de l’autre devient alors une défense contre une intrusion hallucinatoire.

Adolescence, 1998, T. 16 n°1, pp. 293-305.

Dominique Agostini: les violences intra-familiales et leur internalisation: la prison interne

L’auteur étudie les violences intra-familiales sous l’angle du profond clivage-idéalisation que ces violences induisent. Ce clivage fait obstacle au processus d’adolescence, au travail de séparation d’avec le groupe-famille de l’enfance: les violences attaquent, avec le processus d’individuation, la sortie psychique de la cellule familiale du passé. Cette problématique de l’enfermement, de la prison interne qui, sous-tendue par le clivage-idéalisation, incarcère le développement, sera explorée à partir du matériel qu’offre une thérapie familiale et une thérapie individuelle. Un type particulier de clivage-idéalisation sera plus précisément analysé: celui qui alimente les défenses intellectuelles.

Adolescence, 1998, T. 16 n°1, pp. 293-305.

José Luis Moraguès: l’archère qui ne pouvait « lâcher sa flèche »

À partir du cas clinique d’une adolescente sportive de haut niveau (tir à l’arc) ne présentant pas une organisation pathologique structurée, l’auteur analyse les processus de remaniement de l’Idéal du Moi. Ces processus sont mis en évidence à partir de l’analyse du symptôme de la contre-performance et des difficultés relationnelles de l’adolescente. L’accent est mis sur l’épreuve de perte (castration symbolique) qu’impose les remaniements de l’Idéal du Moi : renoncement à l’Idéal du Moi de l’enfance et à la dépendance parentale qui l’accompagne. L’angoisse de castration qui se déplace sur la compétition sportive (perdre/gagner) offre un support métaphorique à l’expression du conflit et le matériau à partir duquel se traite la difficulté psychique.

Adolescence, 1998, T. 16 n°1, pp. 292-305.

Nicole Calevoi, Romano Scandariato: processus adolescent chez les étudiants étrangers et immigrés

L’impact désorganisateur, traumatique qu’a l’expatriation chez les étudiants étrangers et immigrés est envisagé à partir de deux études de cas. La problématique présentée par beaucoup d’étudiants étrangers concerne la répétition de la scène pubertaire et des scénarios qui lui sont afférents. Chez les étudiants immigrés la difficulté liée à l’élaboration adolescente s’exprime par un conflit entre la loyauté due au système d’origine et la nouvelle culture. Le rôle du psychothérapeute consiste à offrir un étayage et un pare-excitations à la nouvelle identité puisse s’élaborer.

Adolescence, 1998, T. 16 n°1, pp. 292-304.

Véronique Nahoum-Grappe: le corps imaginaire de l’adolescent

Il s’agit ici de cerner l’imaginaire social contemporain concernant l’adolescence. La réflexion relève de la sociologie qualitative, c’est-à-dire d’une tentative de description phénoménologique de certains signes choisis comme caractéristiques mais qu’aucune statistique objectivante ne peut légitimer. L’auteur voudrait repérer la contradiction qui existe entre l’exhibition publicitaire du corps jeune et beau et certains traits de l’esthétique adolescente telle qu’elle peut être saisie dans leurs choix de style de présentation de soi, de formes musicales, de bandes dessinées, etc.

Adolescence, 1998, T. 16 n°1, pp. 292-304.