Tous les articles par Admin

Houari Maïdi : églantine

L’adolescent est extrêmement sensible à son image. Celle-ci est autant redoutée qu’investie avec force et fascination. Dans cet article, nous présentons une observation qui illustre, chez une jeune fille, les perceptions complexes et ambivalentes d’un corps empli de maux divers. Un corps qui semble être la boîte de Pandore de toutes les angoisses nées de l’enfance et de l’adolescence, et un corps-vitrine, façade narcissique par le regard de l’autre, craignant en même temps que ce regard ne voie à l’intérieur de l’adolescente, son intimité, ses pensées, ses angoisses, d’où cet aspect paranoïde fréquent à cet âge.

Adolescence, 2011, T. 29 n°4, pp. 779-785.

Nicolas Peraldi : mauvais fils. l’insertion sociale à l’épreuve de la subjectivation

Le récit clinique est un biais, une voie oblique qui n’a de fonction que celle de servir de repère. Aux travers ou, plus exactement, dans les travers d’une trajectoire d’un jeune homme pris en charge par l’Aide Sociale à l’Enfance, dans une mise en échec de toute dimension d’insertion sociale et professionnelle, j’essaierai de montrer comment un processus de subjectivation s’est élaboré afin de permettre à ce jeune de reconstruire son présent à l’aune de son passé, de symboliser et de s’approprier ce qui jusqu’alors n’avait été qu’éprouvé. Ce texte est écrit comme un triptyque. Les trois parties peuvent être lues indépendamment l’une de l’autre, et c’est pourtant dans la liaison entre elles que se développe la spécificité du propos que je souhaite soutenir à travers cet article. Chaque partie renvoie à une lecture, à un temps d’élaboration. Elle s’ouvre par une vignette clinique, comme un préambule à la réflexion qui suit. J’aurais pu lier les vignettes en une seule séquence et développer ensuite mon élaboration point par point. J’ai préféré cette (dés)articulation qui répond davantage, selon moi, à la théâtralisation du cas présenté.

Adolescence, 2011, T. 29 n°4, pp. 765-778.

Marion Haza : la « bestiole mystique ». passage en pubertaire et psychothérapie

La pulsionnalité pubertaire agit dans la thérapie, d’une façon brutale, crue, non symbolisée. L’acting out est généré par l’émergence de nouveaux ressentis pulsionnels non encore élaborés et intégrés au Moi. La capacité créatrice de l’adolescent, portée par le clinicien, permet de sublimer la violence pubertaire et de trouver une voie de dégagement autre que pulsionnelle et sexuelle. Ici, c’est la « Bestiole Mystique » qui viendra symboliser le passage pubertaire et ses investissements.

Adolescence, 2011, T. 29 n°4, pp. 747-763.

 

Jacques Dayan : dépressivité et dépression à l’adolescence

Une tendance à la psychiatrisation systématique des états mentaux conduit à considérer les périodes de tristesse et de découragement persistants de l’adolescent, voire les seuls états de morosité, comme des figures de la pathologie. Nous développons avec D. W. Winnicott, E. Gut, P. Fédida et Ph. Gutton, le point de vue dynamique selon lequel le mouvement dépressif, inhérent à la vie mentale, participe à la régulation de la vie psychique. Mis en jeu par la perte ou l’abandon, il favorise la redistribution des investissements, véritable « ré-affectation ». Le sujet adolescent déprimé nécessite d’être accompagné, non d’être d’emblée soigné. Bien que l’issue de la dépressivité adolescente soit le plus souvent favorable, nous en examinons certains destins dommageables, qualifiant la dépression de « non productive », de « dépression de mort » ou de dépression de déliaison. Deux figures pathologiques emblématiques, l’anorexie mentale de la jeune fille et les conduites toxicomaniaques, sont envisagées comme résistance à une dépressivité, pourtant élément clé d’un processus d’intégration. Elles illustrent, à l’instar du démantèlement de la pensée dans les dépressions psychotiques – désespérément exprimé dans des productions artistiques – le rôle essentiel que joue le corps comme constituant et moyen de la vie psychique.

Adolescence, 2011, T. 29 n°4, pp. 737-745.

Alejandro Rojas-Urrego : appelle-moi seulement amour et je serai rebaptisé

L’état amoureux à l’adolescence prend souvent la forme de la passion et les accents d’une tragédie. Il est aussi craint que recherché, non seulement en tant que retrouvaille et répétition, « réédition de faits anciens » écrit Freud, mais aussi en tant que découverte nouvelle, dynamisme créateur, invention transformatrice. Il représente désormais un second baptême, une nouvelle naissance qui doit parfois dénier la première. Aimer, c’est renaître. Se défaire, afin de mieux se refaire, se recréer. Au risque, bien entendu, de se perdre pour toujours. L’état amoureux à l’adolescence s’impose à l’attention du psychanalyste. L’expérience clinique nous confronte parfois aux effondrements psychiques qui suivent les déceptions amoureuses. Elles sont alors les révélateurs de la qualité des assises narcissiques des adolescents dont l’identité est en souffrance. Reviviscence plus que réminiscence. Dans ces situations où les représentations viennent à nous manquer, la littérature nous est souvent d’un grand secours. Elle peut nous permettre de commencer à mettre en mots une histoire qui n’en a pas. À partir de l’étude de Roméo et Juliette de W. Shakespeare, l’auteur propose plusieurs lignes d’interprétation possibles de l’amour à l’adolescence autour des notions de corps sexuel, de narcissisme, de mort, d’orgasme, de nom.

Adolescence, 2011, T. 29 n° 3, pp. 683-705.

Philippe Gutton : transgresser ou transcrire

Lorsque l’auteur (M. Hatzfeld) parle de la « vitalité sauvage » jaillissant dans le sillage de la jeunesse, je pense que les processus d’adolescence sont le vivant de la jeunesse ; sublimation pubertaire bien à tort interprétée par la réponse sociale comme transgression. La liberté créatrice, concevons-la ainsi n’est jamais seule.

Adolescence, 2011, T. 29 n° 3, pp. 673-676.

Johanne Rosier : la maison de bernarda alba : déni du féminin et refus du changement

Le drame théâtral de Frederico Garcia Lorca « La maison de Bernarda Alba » dévoile la vie de cinq filles maintenues dans un deuil de huit ans imposé par leur mère. Adela, la benjamine s’engagera dans un combat intime et violent contre sa mère, qui scellera le destin de sa féminité. La question centrale porte sur les aléas de la bipartition de la subjectivation féminine entre continuité et changement.

Adolescence, 2011, T. 29 n° 3, pp. 665-671.

Béatrice Mabilon-Bonfils : les élèves souffrent-ils à l’école ? des souffrances scolaires « ordinaires » qui ne peuvent se dire…

Avec la seconde modernité, la construction du sens d’une école prise dans un processus de désinstitutionnalisation n’est ainsi plus transcendante mais immanente pour les élèves. La question de l’expérience scolaire et du ressenti des élèves face à leur scolarité mérite donc d’être posée. Notre enquête nous conduit à poser que le sentiment de souffrance scolaire devient structurel, alors même qu’il est collectivement dénié. L’article se propose d’éclairer le sens de ce déni collectif et de cette invisibilisation sociale de la souffrance scolaire, à l’aune des mutations sociétales contemporaines, avant de dresser une typologie idéal-typique des formes de souffrances à l’école des élèves.

Adolescence, 2011, T. 29 n° 3, pp. 637-664.

Henri Flavigny : urgences psychiatriques et/ou centres de crise ?

Pour répondre adéquatement en urgence aux traumatismes psychiques et aux troubles du comportement de l’adolescent, il faut non seulement considérer l’exécution de l’acte, mais surtout son sens.

C’est celui-ci qui impose la nécessité de disposer d’une gamme de solutions variées : les unes sont réalisées au niveau de la communauté sociale, représentées par les « centres de crise » pour adolescents, non psychiatriques, non médicalisés. Les autres par les « unités psychiatriques de réponse en urgence » aux besoins des adolescents. Ces dernières ne doivent pas fonctionner isolément, mais être articulées avec l’ensemble des éléments d’un intersecteur.

C’est dans la mesure où nos réponses en urgence respecteront le sens de la question posée par l’expression diverse des traumatismes psychiques et des troubles du comportement de l’adolescent qu’elles se révéleront efficaces et que le moment de sa crise pourra constituer un élément positif pour son évolution.

Adolescence, 2011, T. 29 n° 3, pp. 627-636.

Marie-Jeanne Guedj : l’urgence à l’adolescence

À partir de l’expérience d’un centre d’urgences psychiatriques générales accueillant chaque année 700 jeunes de moins de dix-huit ans, et à la suite de l’article d’Henri Flavigny de 1984 sur les réponses en urgence à l’adolescence, des voies de réflexion sont proposées. L’urgence est actuellement un phénomène de société s’exacerbant dans des crises. Nous préférons parler de crise à l’adolescence, processus à la fois intrinsèque et environnemental, pouvant ou non aboutir au service des urgences, de même qu’une urgence se déclinera ou non en crise. La temporalité complexe tant de l’adolescence que de l’urgence est abordée. La paranoïa y est activée, parfois la seule modalité de questionnement du faux quand le compromis est impossible. Ainsi l’urgence apparaît-elle comme le réceptacle de l’impossible adolescence quand la subjectivité est en impasse. Elle se dévoile de façon inattendue comme un endroit de parole et d’écoute.

Adolescence, 2011, T. 29 n° 3, pp. 615-626.