Archives de catégorie : Devant la métamorphose – 2013 T. 31 n°1

Guy Dana, Anne Tassel : une clinique non constituée

Dans un temps de mutation technologique l’adolescent contemporain fabrique de nouvelles modalités d’organisation intersubjectives  (SMS, chat, mail, réseaux, etc.) en produisant les figures multiples de ses nouveaux repères. L’auteure nous invite à suivre le moment chaotique de cette évolution, de façon fragmentaire, comme le propose le mode en rupture de l’abécédaire.

Adolescence, T. 31 n°1, pp. 235-238.

Anna Makerova : mots express montreuil – tcheliabinsk

À partir d’une enquête sociolinguistique auprès de jeunes montreuillois et ouraliens, fréquentant les studios de rap d’Île-de-France et de Tcheliabinsk (Russie), l’auteur met en évidence le fait que leurs pratiques langagières constituent des pratiques d’action. Celles-ci seraient liées au besoin de dénonciation et d’expression des mots ou maux vécus.

Adolescence, T. 31 n°1, pp. 227-234.

Florian Houssier : Sigmund Freud/Eduard Silberstein : une amitié passionnelle et consanguine

E. Silberstein est l’ami d’adolescence qui a marqué la vie de Freud, à partir des treize ans de ce dernier. Entre 1871 et 1881, la riche correspondance entre eux, fondée essentiellement sur les lettres de Freud, fait ressortir un portrait du jeune Freud ; contrairement à l’idée « officielle » d’une adolescence sans histoire, nous soutenons que cette relation a été marquée par des conflits sexuels intenses et une amitié passionnelle qui s’achèvera, comme bien d’autres amitiés masculines ultérieures, par une rupture du lien.

Adolescence, T. 31 n°1, pp. 219-226.

Thomas F. Barrett : défenses maniaques contre la solitude à l’adolescence

Dans cet article je souligne les difficultés auxquelles les adolescents sont confrontés alors qu’ils essayent de parvenir à la séparation d’avec l’objet. Même pour les individus qui vont bien, ce processus est long et conflictuel, entraînant un état interne insoutenable, qui est déclenché par le sentiment de perte d’objet.

Se sentir seul à l’adolescence est la conséquence non pas d’un retrait d’amour de la part de l’objet, mais plutôt d’un processus incontournable à l’intérieur de l’adolescent qui, de façon progressive, retire les investissements libidinaux des objets primaires pour les transférer sur de nouvelles relations adultes. Ainsi, un sentiment profond « d’être » vide, ressenti par beaucoup d’adolescents, est associé à ce processus. Les défenses mobilisées pour combler ce vide sont de caractère maniaque, y compris l’acquisition compulsive des objets de remplacement (e.g., musique téléchargée sur Internet, jeux vidéo, nourriture, vêtements, chaussures, etc.) ainsi que la consommation excessive d’alcool, de drogue et de cigarettes. Toutes ces défenses semblent témoigner d’une tentative régressive, relevant d’un registre oral et des processus primaires (souvent cyclique, rythmée par des mouvements « d’incorporation » et « d’expulsion »), pour tenter de transformer la dépression et le sentiment d’être seul en allégresse, et de trouver répit dans des activités fondées sur le principe de plaisir. J’ajouterai que, bien que les causes de ce sentiment d’être seul soient complexes, il fait partie des nombreux éléments qui sont à l’origine de la promiscuité sexuelle, des troubles d’alimentation et des symptômes de scarification et d’auto-mutilation.

Adolescence, T. 31 n°1, pp. 195-216.

Nicolas Georgieff : l’adolescence à l’épreuve de la neurobiologie ?

L’éclairage « cérébral » de l’adolescence permet de montrer que se joue à cette période un processus complexe d’interaction entre l’environnement et l’organisation cérébrale capable de remodeler celle-ci en fonction de nouvelles contraintes, tant extrinsèques qu’intrinsèques. Social, psychologique et biologique interagissent, le cerveau prenant en quelque sorte l’empreinte à la fois des changements du monde extérieur et des contraintes psychologiques propres au processus adolescent lui-même. L’adolescence illustrerait ainsi, de manière presque caricaturale, un mécanisme adaptatif continu, qui pourrait nous aider à penser d’autres périodes majeures de changement durant la vie.

Adolescence, T. 31 n°1, pp. 185-190.

Jacques Dayan : pour une nouvelle épistémologie

Les neurosciences peuvent-elles conduire à une nouvelle métapsychologie de l’adolescence ? L’article de N. Georgieff, nous conduit à nous interroger sur les concepts de complémentarité et d’intégration, le premier particulièrement développé par G. Devereux. Il emprunta aux domaines essentiels aujourd’hui, des interrogations sur la nature de la théorie suscitées par le développement de la physique quantique et relativiste.

Adolescence, T. 31 n°1, pp. 181-184.

Gilles Raveneau : contribution des rites à la suppléance familiale

Partant d’une recherche ethnographique dans deux Maisons d’enfants à caractère social (MECS), cet article interroge la manière dont le rite et la ritualisation peuvent contribuer à la suppléance familiale. On examine les conditions favorables à l’apparition et à l’utilisation des rites et l’on observe comment ils peuvent être des outils possibles d’inclusion et de participation sociale, associés à la production d’une culture morale et éducative. On fait l’hypothèse que la psychologisation « sauvage » des problèmes par les professionnels et le recours quasi exclusif aux psychologues cliniciens comme régulateurs des difficultés dans ces institutions tendent à sous-évaluer l’intérêt et l’efficacité des rituels, au profit de la seule « clinique de la parole ».

Adolescence, T. 31 n°1, pp. 169-179.

Maryline Nogueira-Fasse : du rite de passage à l’inscription de soi

L’article porte sur une recherche menée en Sciences de l’éducation dans une démarche clinique à orientation psychanalytique, dans le cadre de la formation des enseignants(es). Celle-ci est envisagée sous l’angle d’une crise identitaire professionnelle nécessitant un passage vers un « devenir enseignant » qu’une ouverture à l’anthropologie a permis de mettre en perspective avec les rites de passage. Il sera proposé d’envisager des liens entre la marque corporelle du rituel et « l’inscription de soi » dans un travail d’écriture clinique.

Adolescence, T. 31 n°1, pp. 161-167.

Danielle Hans : le cadre institutionnel dans ses rapports à la transgression et à la Loi

L’analyse d’une courte séquence d’un entretien non directif avec un jeune adolescent conduit l’auteure à considérer le cadre institutionnel comme une instance de réflexivité, dont la fonction de limitation du désir n’est pas un contrôle sur le sujet mais plutôt un moyen de l’aider à se sortir des déterminations psychiques qui l’aliènent. 

Adolescence, T. 31 n°1, pp. 153-160.

Eric Chauvier : l’inconscient de l’enquête, une expérience de savoir

L’observation de la souffrance humaine se fait souvent au moyen d’une distance obtenue par le déni d’états émotionnels qui, pourtant, apparaissent souvent déterminants à l’observateur. Cette contribution cherchera à vérifier cette hypothèse en prenant pour exemple une mission de recherche-action effectuée dans une institution accueillant des adolescents en rupture familiale. Fortement troublé par la voix étrangement désaffectée d’une adolescente, l’observateur se trouve contraint de renoncer au caractère distancié d’un régime habituel d’expertise. Ce n’est pas l’histoire de cette adolescente qui le trouble, mais ce qu’elle lui renvoie de son propre vécu familial, lequel se confond avec une démarche scientifique d’observation. Le retour vers cet « inconscient de l’enquête » constitue la base de ce que nous pourrions nommer une initiation.

Adolescence, T. 31 n°1, pp. 145-152.