L’auteur se réfère au récit La Métamorphose de Franz Kafka comme un récit de transformation, celle des mutations pubertaires où s’entremêlent l’émergence de la sexualité génitale, l’assujettissement du corps au biologique et la permanence du sexuel infantile. Usuellement le fantasme d’auto-engendrement permet d’articuler ces différentes contraintes. L’échec de cette articulation entraîne chez les adolescent(e)s un vécu d’un corps incontrôlable et menaçant qu’il s’agit de maintenir confiné.
Le fantasme d’auto-engendrement (qui vient rendre compte et donner un sens à l’apparition de la sexualité génitale mature) aide à abandonner l’investissement libidinal (sexualisé) familial de type œdipien (trans-générationnel) au profit d’un investissement sexuel de type homo-générationnel. Ce processus de passage de la famille au groupe social (de pairs) est complexe et fait appel à des fantasmes variés sous la forme de scènes (pubertaire, pédophilique, sado-masochiste…) qui renvoient aux groupes internes. Le fantasme d’auto-engendrement dénie, en même temps, la castration, la scène primitive, la différence des sexes, mais il développe transitoirement ce que nous appelons l’homophilie. Dans ce contexte, l’homosexualité pourrait être pensée comme un avatar de cette homophilie mal surmontée. Pour défendre cette position il est fait référence tant à la clinique (individuelle et de groupe) qu’aux pratiques initiatiques.
L’occasion de ce numéro d’Adolescence est en fait de renouveler discrètement une réflexion, concernant les conditions des rencontres entre adolescents et psychanalystes. La rue est le signifiant choisiaujourd’hui pour réfléchir sur l’ajustement des cadres à l’évolution culturelle. En outre, la rue n’est pas seulement un lieu où s’effectue une ouverture de la clôture familiale : thème de la cure. Elle est un espace-temps de subjectivation “ entre pairs ”, soumis à la “ loi du pairage ”.
L’auteur à partir d’une réflexion sur ses pratiques psychanalytiques avec des adolescents, propose une théorisation des enjeux psychiques en termes de scénalité/obscénalité. Il montre l’importance centrale des fantasmes originaires et la fonction de l’intrus dans la constitution des enjeux de l’intimité et de l’identité. Il propose à partir de là une lecture spécifique des dispositifs psychanalytiques en termes de groupe transformationnel des scénalités et de groupalités intérieures.
Michael Jackson figure une adolescence éternelle, rejoue le scénario d’une individuation pénible et inaccessible. Ses métamorphoses se font l’écho des transformations psychiques et physiques des jeunes pubères. Son mythe fortement imprégné de ruptures généalogiques, évoque un personnage en prise avec un puissant désir d’auto-engendrement. Son polymorphisme maximise les possibilités identificatoires des adolescents, et sa médiagénie favorise son appropriation sur le mode de la revendication sociale. Sa capacité à incarner la toute-puissance le place comme un formidable support de projection, faisant écho aux désirs narcissiques des jeunes.
Certaines conduites à risques ont pu être comprises comme symptomatiques d’un « détraquement » des rites à l’adolescence. Ces comportements sont davantage utilisés pour tutoyer la mort, pour réintroduire le jugement ordalique quand des adolescents ne parviennent pas à intégrer l’insaisissable, faute d’être étayés dans leur cheminement par des références à l’institution. Toutefois, ces séquences paradoxales flirtent également, de manière cryptée, avec des mécanismes d’auto-création de soi dans un contexte de filiation traumatique. Ainsi, ces dynamiques reposent à la fois sur le fonctionnement adolescent, de leurs groupes et se trouvent mobilisées en négatif lorsque règnent des violences traumatiques en héritage. Nous proposons de discuter de ces configurations à travers l’exemple d’un groupe de jeunes harkis.
Adolescence, 2010, T. 28, n°4, pp. 899-906.
Revue semestrielle de psychanalyse, psychopathologie et sciences humaines, indexée AERES au listing PsycINFO publiée avec le concours du Centre National du Livre et de l’Université de Paris Diderot Paris 7