Archives par mot-clé : Paradoxalité

Aymeric Philonenko : l’adolescent et sa famille aux prises avec la paradoxalité

La lecture métapsychologique du phénomène de double bind et de la paradoxalité psychique autorise la compréhension de leur importance dans la (dé)structuration psychique du sujet, ainsi que l’élaboration des manifestations transférentielles et contre-transférentielles que ceux-ci impliquent, dont la reconnaissance est un enjeu thérapeutique majeur. Enfin, le concept de paradoxe permet a fortiori de remettre au travail et « en jeu » les questions des limites et des frontières à l’adolescence.

Adolescence, 2020, 38, 1, 177-189.

Philippe Gutton : « j’accuse »

La pensée ou le fonctionnement paranoïaque a une certaine spécificité au sein des processus d’adolescence. Elle serait une limite ordinaire ou pathologique imposée à leur créativité, limite inscrite dès le pictogramme pubertaire dont le déroulement ne se fait pas avec l’Autre mais contre l’Autre. La base sur laquelle s’effectue la création adolescente est l’état d’illusion pubertaire au sens winnicottien au sein duquel le « moi infantile » et le « non encore-moi pubertaire » sont en paradoxalité. La paranoia serait l’effet d’une injonction paradoxale venue du sujet et de son environnement attaquant l’état d’illusion fondamental. À partir de cette thèse sont compris les traits de la paranoia adolescente : pensée causaliste, couple déni-projection, accusation du corps génital.

Le dernier chapitre cherche les corollaires possibles de cette thèse pour la cure adolescente afin de contourner l’obstacle paranoïaque : travail dans la mesure du possible de l’ordre de la pensée associative, refus de l’opposition dedans-dehors au bénéfice d’une mutualité à l’intérieur de la séance prise comme observatoire des événements extérieurs régulièrement relatés par l’adolescent, importance du contre-transfert provocateur du transfert positif.

Adolescence, 2008, T. 26, n°3, pp. 571-596.

Philippe Gutton : le paradoxe mystique

L’évolution mystique de Thérèse de Lisieux est examinée à partir du modèle de l’état d’illusion (selon l’approche de D. W. Winnicott). Ce dernier défini par sa paradoxalité “ Moi, non-Moi ”, “ vivre-mourir ”, est fragile sous la menace d’une injonction paradoxale. Toute son enfance, cette menace fut mise en acte par ce que Thérèse nommait après la mort de sa mère “ ses mamans ”. Enfance fort mouvementée qui se révéla mystique lorsque à l’adolescence ses tuteurs d’illusions se condensèrent en “ maman-Jésus ”. “ Conversion ” dit-elle, transfert bientôt consolidé par sa vocation de carmélite et sa doctrine.

Adolescence, 2008, T. 26, n°1, pp. 65-88.

Philippe Gutton : paradoxes en métamorphose

La métamorphose instaure une contradiction paradoxale entre originalité et programme, « hasard et nécessité », désordre et ordre, différence et similitude, sujet et assujettissement, ouvrant une réflexion entre sublimation et emprise. Paradoxal est également son déroulement dans le temps, car l’illusion pubertaire est créatrice dans la mesure de son oscillation avec la désillusion. Reprenant l’adage fondamental de R. Kaës dont on ne saurait négliger la paradoxalité : « Le sujet est d’abord un inter-sujet », la métamorphose pubertaire est de façon exemplaire celle de l’inter-sujet, elle inclut en sa procédure même l’autre. Pas de changement structural solitaire. Le pubertaire n’est pas une (re)trouvaille de l’objet mais une révélation de l’altérité génitale.

Le « contrat métamorphosique » s’élargit singulièrement lorsqu’il désigne la création en mouvement d’un lien entre sujet et société, individu et ensemble, discours singulier et référent culturel.

Adolescence, 2011, T. 29 n°1, pp. 171-189.

Yves Morhain : paradoxalité de « l’enfermement » d’adolescents et de jeunes adultes meurtriers : entre destructivité et créativité

L’actualité de la délinquance qui se signale par l’agression contre l’autre, le semblable, souvent brutale, voire par l’explosion destructrice immédiate, relève de l’archaïque qui renvoie à l’existence subjective du sujet. Les approches judiciaires proposent des formes de rééducation sociale et de prévention, centrées sur l’acte transgressif, désorganisateur et non sur son potentiel refondateur, avec pour conséquence l’« enfermement » de ces adolescents et jeunes adultes difficiles, reproduisant à l’intérieur des murs de la prison une stigmatisation des fauteurs de troubles.

Dans ce qui se révèle une impasse, l’« enfermement » peut opérer et induire la dynamique d’un passage, en instaurant des dispositifs de médiation thérapeutiques qui engagent l’adolescent violent à un travail de ré-élaboration psychique et de relance de sa dynamique subjective, ouvrant l’accès à des satisfactions pulsionnelles constructives, créatives et non pas lieu de décharge pour ces adolescents. Ces espaces de transformation pouvant donner lieu à symbolisation et replacer ces jeunes dans un réseau d’intersubjectivité, dans une communauté d’échanges qui leur permette de se tourner vers un espace de possibilités.

Adolescence, 2013, 30, 4, 797-813.