Archives de catégorie : Sexualités et SIDA – 1999 T. 16 n°2

Moses Laufer : Maltraitance sexuelle ou structure délirante ? de l’adolescent au jeune adulte

 L’auteur décrit la cure d’une patiente adolescente qui rapporte avoir été abusée sexuellement par son père durant l’enfance. Au cours de la cure, l’analyste se mit à douter de la véracité d’un tel souvenir. Au fur et à mesure que l’analyse avançait, l’analyste eut l’impression que les réponses de la patiente à ses interprétations renvoyaient de plus en plus à une structure délirante. Lorsque la patiente eut l’impression que l’analyste avait des doutes sur ses souvenirs, ou n’était pas de son côté, elle interrompit brusquement la cure. Elle resta dès lors une jeune femme extrêmement vulnérable. La structure délirante contenait le besoin sexuel de la patiente de détruire toute potentialité de puissance masculine, ce qui représentait pour elle le mécanisme de défense à mettre impérativement en place contre son propre désir pour la mère œdipienne qui, dans la réalité, avait quitté la patiente pour se remarier.

Adolescence, 1999, T. 17 n°2, pp. 71-83.

Bruno Deswaene : Adolescence et catastrophe

L’adolescence constitue une temporalité spécifique qui bouleverse le développement ontogénétique de l’être. En ce sens, elle est une catastrophe morphogénétique qui doit être assimilée par le sujet. En tant qu’étape structurellement fondamentale sur le plan psychique, elle tient compte des expériences et des points de rupture antérieurs. Cependant, la souffrance ne rime pas systématiquement avec rupture ou crise, bien quíon lui attribue généralement un caractère mortifère. La rencontre préalable et précoce avec le sexuel dans le cadre d’un attentat sexuel survenu à la période de latence modifie le déroulement classique de l’équilibre psychique. Sur le plan social, ce vécu expérentiel initial engage une perception spécifique de nature catastrophique et inscrit, le plus souvent, le vécu dans une vision destructrice, c’est-à-dire modifiant l’ensemble des éléments que constitue la stabilité psychique du sujet. Cependant, l’appropriation de cette expérience du sexuel comme expérience de vie ne serait pas à concevoir comme un processus d’involution ou de barrage de l’évolution psychique, mais serait à réfléchir comme une étape à prendre en compte dans le déroulement successif des catastrophes inscrites dans l’ontogenèse humaine, connotant, de ce fait plus particulièrement la phase de l’adolescence qui constitue un temps singulier dans la révélation de l’attentat sexuel. Celle-ci se révélerait alors être un moment de personnalisation par le sujet de ce qui est pour lui une catastrophe intime.

Adolescence, 1999, T. 17 n°2, pp. 59-70.

 

Claude Thiaudière : Les usages de l’adolescence : réduire le désordre de líépidémie

À partir du constat que la prévention du sida auprès de l’adolescence et de la jeunesse est importante alors que l’épidémie concerne peu ces catégories de population, l’auteur développe une réflexion sur la complexité des représentations sociales associant sida et adolescence, en partant de l’idée que ces catégories résultent d’un  » travail  » des institutions sociales. Ainsi développer un discours préventif sur le sida auprès de ces catégories a pour effet d’intégrer le sida dans un discours consensuel plutôt que de parler au nom de catégories marginales (homosexuels, toxicomanes, migrants d’Afrique). En s’adressant à ces deux catégories, on met en jeu des modèles de fonction sociale (l’institution biographique pour l’adolescence, le groupe territorial pour la jeunesse). Cette lecture de l’action de prévention fait apparaître le clivage politique sous jacent, d’un côté l’adolescence à protéger des risques liés au sida ; de l’autre la jeunesse, à protéger des risques que le sida fait courir à la société.

Adolescence, 1999, T. 17 n°2, pp. 47-58.

Serge Hefez : Adolescence et sida : líimpossible transmission

La plupart des interrogations formulées par les adolescents séropositifs participant à notre groupe de parole concerne le secret qui entoure les contaminations. Ce secret est générateur de clivages et de dénis qui protègent dans un premier temps líadolescent comme líensemble de sa famille ; il se transforme cependant rapidement en un attracteur qui aspire les investissements émotionnels, qui structure un pôle vers lequel convergent les résistances du discours, et qui cristallise le dispositif défensif en une figure organisatrice de répétition et díhoméostasie. Les mécanismes du désaveu et de sa transmission ont beaucoup été étudiés sur le plan transgénérationnel. Les situations de groupes ou d’entretien familial portent cependant notre attention sur díautres mécanismes, à savoir les processus et les formations psychiques impliquées dans les dynamiques intergénérationnelles.

Adolescence, 1999, T. 17 n°2, pp. 30-40.

Françoise Weil-Halpern : Devenir adolescent dans une famille touchée par l’infection vih.

L’irruption du VIH dans le champ pédiatrique a bouleversé la vie et l’avenir d’une famille. Elle a pris à contre-courant les progrès dans le domaine de la connaissance des conséquences des séparations, de la maladie, de la mort d’un enfant ou des parents. Elle nous a obligé à reconsidérer les notions telles que le concept de vie : désir d’enfant, donner la vie, élever, protéger, guider, maintenir en vie, aider à vivre, à mourir. La mère, un des enfants, parfois le père, livrent un combat sans merci, contre la maladie, la discrimination, l’isolement, le secret, la souffrance, la peur de la mort. Face à ce séisme, l’auteur s’est demandé ce que ressentent, deviennent les enfants infectés ou non à l’adolescence. À travers des histoires d’enfants, l’auteur tente de montrer leur sort tragique. Comment survivent-ils à cette hécatombe ? Comment se fait ou non le travail de deuil ? Quels souvenirs gardent-ils ou sont-ils autorisés à garder de leur mère, de leur père ? Quelle histoire construiront-ils ? Qu’en est-il de la culpabilité  ? Autant de questions pour lesquelles il n’y a pas toujours de réponse. Les récents progrès dans le domaine thérapeutique ont apporté des changements qui sont autant d’espoirs que de souffrance.

Adolescence, 1999, T. 17 n°2, pp. 17-29.